A l’école maternelle Joliot-Curie de Stains, trois enseignantes co-enseignent pour mieux faire réussir leurs élèves

A l’école maternelle Joliot-Curie de Stains, en réseau d’éducation prioritaire renforcé, entre les classes de grande section de Lola d’une part et de Dorothée et Claire d’autre part, la porte est ouverte et les enfants vont et viennent d’un espace à l’autre. C’est une vraie « ruche » avec des élèves qui travaillent dans tous les coins, en autonomie ou avec une des trois maîtresses, seuls ou en petit groupe.

  

Dorothée et Claire étaient déjà en co-enseignement l’année dernière, suite au dédoublement des classes de grande section en éducation prioritaire et à la configuration de l’école. Elles ont apprécié cette expérience mais avaient l’impression de manquer d’espace pour mettre en œuvre tous leurs projets. Cette année, avec l’aide de la directrice de l’école, elles ont décidé d’ouvrir leur fonctionnement à la classe de Lola et à ses élèves. 

Une mutualisation des espaces et du matériel

Elles ont ainsi pu faire de leurs deux classes un grand espace organisé en « pôles d’apprentissages » : la classe de Dorothée et Claire s’est plus spécialisée dans le langage et les arts plastiques. On y trouve, notamment, les espaces écriture, lecture, écoute, arts plastiques et jeux d’imitation. Quant à la classe de Lola, elle est plus « scientifique » avec les espaces mathématiques, explorer le monde et jeux d’interprétation.

  

L’espace écriture et une partie de l’espace mathématiques

 

L’espace arts plastiques et l’espace "Explorer le monde"

 

L’espace "J’interprète" et l’espace lecture

Les trois enseignantes ont mis en commun leur matériel et ont créé des espaces d’apprentissages plus grands et plus riches.
Leurs espaces symboliques ou jeux d’imitation sont notamment très originaux. Ils changent au retour de chaque période de vacances scolaires et sont toujours en lien avec le projet de classe : « Docteur » en période une pour travailler sur le corps humain, puis « Vétérinaire » pour apprendre à sauver les animaux en danger, ensuite « Agence de voyage » pour travailler sur la géographie, aujourd’hui « Office de tourisme » en lien avec leur projet sur la découverte de Paris. 

 

"L’agence de voyages" et "l’office de tourisme"

Un fonctionnement qui favorise l’autonomie des élèves

Ce grand espace leur a permis de mettre au point un fonctionnement original qui favorise l’autonomie des élèves. 

 

Une élève consulte son plan de travail pour la matinée.

Les enseignantes attribuent à chaque élève un plan de travail individualisé par période pour chaque demi-journée de classe. Les élèves réalisent en autonomie leurs activités qui leur permettent de s’exercer sur des notions déjà abordées. Ils vont eux-mêmes chercher le matériel nécessaire dans l’espace d’apprentissage correspondant à l’activité.

Au fur et à mesure de la période, les élèves font valider par leurs enseignantes les différents ateliers.

Pendant ces temps d’ateliers individuels, chacune des enseignantes met en œuvre des ateliers dirigés avec un petit nombre d’élèves pour aborder de nouvelles notions ou remédier aux difficultés. Il n’y a pas de groupe fixe dans la classe, les enseignantes rassemblent les élèves en fonction des besoins de chacun.

Bien sûr, ce fonctionnement en plans de travail n’exclut pas des temps de regroupement, notamment pour travailler la compréhension de lecture, la phonologie, le vocabulaire, les sciences … Chaque élève retrouve alors son espace classe.

Un enrichissement des propositions pédagogiques et une adaptation au plus près des besoins des élèves

Travailler à trois, en mutualisant les espaces et le matériel, avait pour ambition première d’enrichir les propositions pédagogiques pour les élèves.

D’autres avantages sont apparus au fil de la pratique.

Pour la préparation de la classe, les enseignantes apportent chacune leurs compétences et spécificités. Elles croisent leurs regards, se partagent le travail. Cela leur permet d’approfondir leurs propositions et de faire varier les entrées pédagogiques pour mieux répondre aux besoins de chacun.

Travailler à trois permet aussi de poser un regard croisé sur les élèves : les besoins de chacun sont mieux analysés et pris en compte.

Chaque enseignante a une façon différente d’aborder les notions et certains élèves ont plus d’affinité avec une enseignante qu’avec une autre. « Quand on sent que cela bloque avec un élève, on se passe le relais et à trois on parvient toujours à trouver une solution », explique Dorothée.

Finalement, le fonctionnement bénéficie à tous les élèves, car il permet de s’adapter à chacun. Les élèves les plus à l’aise vont pouvoir aller plus loin grâce au plan de travail individualisé et à tous les ateliers libres proposés dans les espaces d’apprentissage. Les enseignantes ont alors plus de temps pour accompagner les élèves qui en ont le plus besoin.

Des résultats au-delà des attentes

D’abord en terme d’autonomie...

« Nos élèves n’ont jamais été aussi autonomes et beaucoup plus rapidement que nous le pensions. Ils vont naturellement d’une classe à l’autre, d’un espace à l’autre, et gèrent seuls leurs activités. Ils prennent des initiatives, inventent eux-mêmes des nouveaux scénarios dans les différents espaces. », constate Claire.

« Surtout ce qui est frappant c’est l’entraide que cela a créé entre eux.  », ajoute Lola.

« Bien sûr, au départ, cela a nécessité quelques ajustements, le temps de créer une cohésion et de s’accorder sur les différentes règles de fonctionnement. Par exemple pour les toilettes, les élèves ont bien essayé de voir s’il était possible de se tourner vers une autre enseignante quand une première avait dit non mais tout s’est très vite réglé grâce à beaucoup de communication. », précise Claire.

... et en termes d’apprentissage

Les enseignantes constatent que leurs élèves sont « vraiment plus en avance cette année » et que cela permet de prendre davantage en compte les besoins de tous. Beaucoup sont, par exemple, déjà entrés dans la lecture, bien plus que les années précédentes. Par ailleurs, des élèves qui n’avaient quasiment pas été scolarisés ces deux dernières années commencent à rattraper une partie de leur retard.

Des enseignantes heureuses

« Pour nous, il n’y a que du positif », disent-elles en chœur, « même si cela n’a pas diminué notre temps de préparation.  »

« Nous nous enrichissons toutes les trois, et c’est un vrai plaisir au quotidien. » « Nous avons tout le temps de nouvelles idées, et à trois nous parvenons à les mener jusqu’au bout.  »

Aujourd’hui, elles n’ont qu’une envie : «  continuer l’année prochaine  ». 

 

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© DSDEN93 - article actualisé le 17 mai 2023